L’enfant Philip Roth a sept ans. Il vit entouré de ses parents, de son frère ainé et de son cousin à Newark, paisible quartier à majorité juive où chacun vit sa citoyenneté américaine avec bonheur. Nous sommes en 1940 et Roosevelt est président. Le meilleur homme du monde pour le père. La guerre gronde en Europe : l’Allemagne nazi d’Hitler a entamé sa terrible ascension. Et les échos qui proviennent du vieux continent ne rassurent pas : on massacre les juifs là-bas ! Que doivent faire les Etats-Unis ? S’engager aux côtés de l’Angleterre pour défendre les plus évidents principes d’humanité ? C’est à ce moment qu’entre en scène Lindberg. Briguant la présidence contre le trente deuxième président Roosevelt, il prononce un discours radiophonique qui va plonger les Etats-Unis dans l’obscurantisme.
Lindberg est le représentant de la politique républicaine isolationniste ; flattant la peur des américains, il s’engage à protéger l’Amérique d’un nouveau conflit. Arguant que cette guerre ne les concerne en rien, il accuse Roosevelt d’être un « va-t-en guerre » à la main d’un lobby juif. Héros de l’aviation, Lindbergh utilise cette renommé pour conquérir les électeurs et part à la chasse au vote à bord de son célèbre « Spirit of Saint Louis ». Contre toute attente, c’est un raz de marée électorale qui le conduit à la Maison Blanche.
La famille Roth veut encore croire en son pays. Et pour se rassurer, quel meilleur moyen qu’un voyage dans la capitale, Washington, pour redécouvrir tous les symboles de la démocratie américaine. Mais ce pèlerinage ne sera qu’une terrible déception : déjà les plus bas instincts de l’antisémitisme envahissent le pays. Face à cette dure réalité peu de voix s’élèvent et il faut attendre le dimanche soir pour entendre le sémillant Winchell attaquer ouvertement la politique de Lindberg, devenant ainsi le dernier rempart de la liberté de parole. Au fur et à mesure, des pages les personnages succombent à la paranoïa, à la peur et à la déception. Même si Lindberg et ses partisans se défendent vivement quant à leur antisémitisme, en engageant notamment un ponte des autorités juives, leurs actions portent de plus en plus préjudice à la communauté juive. Et la rencontre du président Lindberg avec Hitler marque un tournant majeur dans les relations internationales des Etats Unis, mais initie aussi un tournant pour la politique intérieure. Une forme d’apartheid commence alors sous couvert d’action d’intégration. La propagande et le populisme envahissent les médias et les Etats-Unis basculent vers un avenir obscur et incertain. Comment l’Amérique aurait-elle pu succomber à un tel fléau ?
Le complot contre l’Amérique, Philip Roth, Gallimard, folio 2007