Tout commence par la quatrième de couverture : « Napoléon, Landru, Lénine, Hitler, Victor Hugo… Tous des porcs ! ». Mais que fait Victor Hugo parmi ces dictateurs et assassins ? Le monument de la littérature française affublé d’un costume de porc ! Il n’y pas d’erreur possible : le voilà sur une photo de classe accompagné des plus illustres coquins et bourreaux… Des porcs assez bien croqués pour reconnaître en eux nos plus beaux salauds de l’histoire.
Cette question, notre pauvre Victor Hugo cela pose aussi. Mais pourquoi, lui ? Lui qui repose au Panthéon ? Le voici à discutailler avec ce corse, celui qui a voulu soumettre toute l’Europe et distribuer les bons points à sa famille. Et, pourquoi pas Emile ? Et si Victor Hugo était là « à cause de quelques boudins engrossés » ? Quel triste purgatoire pour un tel génie ! Son compagnon de porc, Napoléon, quant à lui traîne ses savates dans cette ferme depuis un bail… Et malgré de multiples efforts de rédemption rien y fait : il se réincarne inlassablement en cochon pour assister passivement mais non sans trait d’esprit aux grands événements du XXème siècle. Rejoins peu à peu par tous les généraux, rois, empereurs ou dictateurs et même bouchers de ce siècle, Napoléon cherche à décoder ces non sens de l’histoire. On traverse ainsi les deux grandes guerres, le krach de 1929, la révolution russe et toujours cette technologie qui transforme tout sur son passage. Et pendant ce temps là, deux vaches philosophent devant un train…
Avec humour, Ptiluc nous brosse un portrait sans concession de ces porcs historiques. Sans tomber dans le piège de l’acharnement et de la dénonciation facile, il est jouissif de voir ces personnages se confronter à leur nouvelle condition. Et on assiste à des conversations surréalistes entre les Habsbourg, Staline, Hitler, Napoléon, les généraux français, la bande à Bonnot ou Landru et bien d’autres : ces différentes scènes nous livrent un monde à la fois sombre et pessimiste mais toujours avec cet humour qui rend l’absurde si drôle ! Et surtout l’Histoire ne s’arrête pas au simple constat : elle pose question même aux porcs. Regardez cette mare aux cochons qui se transforme en « Pig Corporation », sans un brin d’herbe, juste de la farine animale où Napoléon reconnaît Victor Hugo !
Le plus surprenant, c’est qu’on finit par s’attacher à ce Napoléon repenti, mais si vite rattrapé par ses vieux démons orgueilleux et guerriers !
La foire aux cochons, I, L'art d'accommoder les restes, Ptiluc, L'Echo des Savanes
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